Le jeu de la vie

(Game of Life)







Par Stéphane Durand

Complément à la capsule audio de Radio-Canada



Il faut bien comprendre que le côté esthétique des animations est rudimentaire. Ce qui est important, comme expliqué dans la chronique radio, c'est le principe : des règles ultra simples permettent de faire apparaitre un monde immensément complexe, incluant l'auto-reproduction. (Les deux seules règles sont : naissance si 3 voisins, survie si 2 ou 3 voisins.) Voici quelques vidéos, puis quelques sites explicatifs :

  • Un des objets les plus célèbres (le Glider Gun)

  • Méditez sur cette séquence totalement hallucinante (la vidéo va partir à 1:53 min; écoutez-en au moins 2-3 minutes!)

  • Une autre gigantesque forme en mouvement assez époustouflante (mais avec une moins bonne musique...).

  • Une propriété sidérante : une structure dans la structure dans la structure (appelée "Life in life")

  • Une description dans Wikipédia

  • Dans Wikipedia-anglais avec une discussion de l'auto-reproduction (self-replication)

  • Un autre très bon site (en anglais)

  • Un très bon article plus poussé (en français)

    Ce jeu permet même de simuler les portes logiques de la programmation d'un ordinateur, et permet donc de calculer tout ce qu'un ordinateur peut calculer. Par exemple, il peut calculer les nombres premiers. Certes, il est compliqué de trouver les configurations initiales sophistiquées qui conduisent à des évolutions remarquables. Mais il ne faut pas oublier qu'on peut introduire des "mutations" aléatoires dans le jeu (comme dans la vraie vie), ce qui permet (si on laisse évoluer le jeu assez longtemps) de générer presque toutes les possibilités. Notons finalement qu'il est impossible de prédire l'évolution de toutes les configurations imaginables, c'est un problème indécidable.

    On peut voir ici un calculateur de nombres premiers : les nombres apparaissent dans la diagonale du bas, comme des points en mouvement dont l'espacement détermine la valeur (en commençant par 2).

    Selon le célèbre penseur Daniel Dennett, tout philosophe devrait se pencher sur la complexité émergente inouïe du Jeu de la vie!

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    L'auto-réplication :

    Il y a toutes sortes de catégories d'autoreproduction : des très simples et d'autres plus complexes comme le mécanisme de reproduction du vivant via l'ADN (qui contient le génome). C'est ce dernier type qui est vraiment intéressant car le vivant ne fait pas que se reproduire, il évolue aussi. C'est-à-dire que la reproduction permet des mutations qui vont engendrer des copies avec des variantes, certaines de ces variantes étant supérieures à l'original. Certains automates cellulaires (différents du Jeu de la vie) permettent justement ce type d'évolution en étant construits en deux parties : une partie qui est l'organisme en tant que tel, et une partie qui est le "génome" contenant le plan de l'organisme. L'autoréplication se fait aussi en deux étapes (comme dans le vivant) : tout d'abord une copie du génome, puis la construction de la copie de l'organisme à partir de la copie du génome. Ce sont les variations du génome qui permettent d'engendrer des copies légèrement différentes de l'original. Ces automates correspondent à une reproduction asexuée, comme on en retrouve chez certaines espèces vivantes. La reproduction sexuée, encore plus performante du point de vue de l'évolution, n'est qu'une variante facilement explicable. Le fait que de tels automates existent démontre que l'existence de la vie sur la Terre n'a rien de "magique"!

    Notez que ces automates "avec génome" ont été développés pour la première fois par le célèbre physicien-mathématicien John von Neumann vers 1950, donc avant la découverte de l'ADN! Et aussi avant la construction des premiers ordinateurs : donc von Neumann avait tout compris et calculé de façon théorique! Pour un approfondissement de ces questions, voir ce deuxième article de Jean-Paul Delahaye, ainsi que cette conférence du même auteur : l'automate de von Neumann est introduit à 49:00 min et on commence à le voir fonctionner à 50:37 min.

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  • Toutes les chroniques (celle-ci est la no 121)

    par Stéphane Durand