Survol

C'est l'âge d'or de la géométrie, dans son sens large, et surtout de la géométrie des structures les plus simples et naturelles sur les variétés. Plus que jamais, nous nous approchons d'une compréhension des éléments de bases qui constituent les espaces les plus compliqués, qu'ils soient riemanniens, complexes, algébriques, symplectiques ou dynamiques. En contemplant ce développement, on aperçoit le rôle omniprésent joué par l'extrémalité et la stabilité compris dans plusieurs contextes : la preuve de la conjecture de Poincaré et les méthodes paraboliques qui atteignent la minimalité dans les variétés de basse dimension nous placent à peu près au même endroit que les mathématiciens de la fin du dix-neuvième siècle, lorsqu'il fallait inventer, au-delà de la méthode analytique de l'uniformisation, une théorie topologique complète afin d'établir une classification satisfaisante. Les notions de minimalité et de l'extrémalité se trouvent également dans les dimensions plus élevées, dans le cas Kähler-Einstein et en géométrie kählérienne à courbure scalaire constante, où Aubin, Yau, Tian et Donaldson ont établi des théorèmes d'existence de base. La notion d'extrémalité se trouve aussi derrière la preuve spectaculaire récente de Taubes de la conjecture complète de Weinstein sur l'existence des orbites fermées du flot de Reeb sur les variétés de contact. Bien que cette preuve s'appuie sur une interaction subtile entre la théorie contravariante de Seiberg-Witten et l'homologie de contact plongée covariante, la conjecture en soi, et ultimement l'idée de la preuve, repose sur la minimalité d'une action associée à une trajectoire fermée qui peut aussi être calculée comme une capacité. Dans la topologie et géométrie symplectiques, le progrès réalisé depuis une décennie est remarquable dans presque toutes les questions importantes : tandis que la théorie symplectique des champs relative, considérée par certains mathématiciens comme la théorie ultime de la mécanique classique et quantique, se développe rapidement avec des outils en provenance de plusieurs domaines des mathématiques (les fondations analytiques, le formalisme algébrique, l'intuition et le contexte géométriques), des avancées dans tous les aspects de l'omniprésente théorie de Floer percolent maintenant dans les variétés de dimension 3 et 4. De façon presque indépendante, la théorie des courbes J-holomorphes fut utilisée pour dériver des invariants énumératifs réels, ouvrant pour la première fois le domaine de la géométrie algébrique énumérative réelle qui stagnait jusqu'alors depuis sa naissance il y a presque deux siècles.

Les espaces de module sont présents partout : les espaces de métriques, qu'ils soient kählériens ou presque kählériens, l'espace des structures presque complexes, l'espace des représentations du groupe fondamental des surfaces ou des 3-variétés dans les groupes de Lie appropriés et les soi-disant espaces de Teichmuller d'ordre supérieur, le groupe des difféomorphismes hamiltoniens sur lequel se donne la norme de Hofer, l'espace des configurations des soi-disant « clusters », une espèce de dual de la A?-structure de Fukaya, l'espace des fonctions pseudo-algébriques sur les courbes algébriques qui sont mystérieusement liées aux systèmes intégrables, aux matrices aléatoires, aux invariants Gromov-Witten, tous ces espaces attirent actuellement l'attention de la communauté mathématique plus que jamais, avec une perspective interdisciplinaire qui est clairement essentielle.

L'année thématique portant sur les espaces de module, l'extrémalité et les invariants globaux se consacrera à l'étude de ces questions qui sont au coeur des développements actuels en géométrie. Le programme sera composé de huit ateliers de recherche avec des mini-cours ainsi que plusieurs séries de conférences André-Aisenstadt, le tout coordonné afin de maximiser les interactions. Le programme soutiendra également des visiteurs et des boursiers postdoctoraux qui travailleront au sein du CIRGET, le laboratoire de géométrie et topologie du CRM. Des conférences préparatoires seront données aux étudiants avancés des cycles supérieurs et aux jeunes chercheurs sur des sujets reliés aux ateliers.